Au centre, la femme
Par Amel BEN ABA
Le Maghreb du 14/1/1984
Les femmes ont pris une part active au mouvement de protestation qui a soulevé le pays contre la hausse de prix du pain. Lycéennes, étudiantes mais aussi et surtout mères de famille ont exprimé leur mécontentement dans la rue. Le vendredi 6 janvier, leur joie a éclaté en slogans, danses, chants et you-yous.
A El Hamma, elles ont été les premières à sortir dans la rue auraient occupé colère. A Refeyef, elles auraient occupé le gouvernorat. Au Kef, à Sfax, elles étaient nombreuses dans les manifestations du mardi, y appelant ceux qui, sur les trottoirs, hésitaient. A la Marsa, ce sont les ouvrières du textile qui ont conduit le cortège qui s’est dirigé vers le palais présidentiel. A Mellassine, elles sont distribué les gourdins, fourni les pierres et aspergé d’eau les manifestants asphyxiés par les grenades lacrymogènes. A Borj Ali Rais, elles se sont attaquées à coups de cailloux de pelles au bus.
…Ce lundi matin, beaucoup d’entre eux étaient partis à l’école le ventre creux. Dans leurs yeux, la révolte sur fond d’angoisse, la même qu’ils ont lue dans les yeux de leur mère, de leur père, des voisins. Ce n’est pas dans ces quartiers là qu’on jette le pain à la poubelle.
…Les mêmes you-yous qui ont souvent accompagné les véritables batailles rangées avec la police, ont fusé de touts les foyers à l’annonce de l’annulation de l’augmentation. Dans un élan spontané, des femmes sont sorties dans les rues, en robe de chambre, à moitié voilées, voilées. Ce vendredi 6 janvier, dans les rues débordantes de vie, des enfants, des hommes, des femmes chancellent de joie. Une joie énorme mêlée d’incrédulité.
…A Beb Souika, sur la petite place triangulaire, un groupe de femmes et de jeunes filles enrouées à force d’avoir crié.
Porte de France encore, une vieille femme, le voile sur les hanches, tient un grand drapeau. Deux jeunes gens sur une moto le lui demandent. Elle dit non de la tête et s’y accroche très fort.