Despote éclairé : Mezri Haddad

Despote éclairé

Par Mezri Haddad

Jeune Afrique Avril 2000

 

Despote éclairé, Bourguiba n’en était pas moins tout le contraire de l’autocrate sanguinaire. Les Tunisiens n’ont pas connu ce que les populations de l’Europe de l’Est ou celles de l’Amérique latine ont subi. Nonobstant ses égarements sporadiques, le régime bourguibien était une exception dans un monde arabe tantôt galvanisé par des révolutionnaires intempestifs, tantôt anesthésié par des monarques inamovibles. Chef d’Etat modéré, rationnel et pragmatique. Bourguiba était aussi un stratège visionnaire. Et il en fit la preuve à plus d’une reprise.

D’abord, au plus fort de la Seconde guerre mondiale, lorsqu’il choisit de se ranger aux côtés des Alliés contre les puissances de l’Axe. Puis, en choisissant le camp du « monde libre » à une époque où les petits Etats tombaient les uns après les autres dans l’escarcelle du bloc communiste. Ensuite, en adoptant une position quasi prophétique quant au règlement du conflit israélo-palestinien. Enfin, sur le plan intérieur, en instaurant le Code du statut personnel, qui scellait définitivement l’émancipation de la femme, et en sécularisant la justice et l’enseignement, deux secteurs névralgiques jusque-là sous contrôle des Zeitouniens.

Bourguiba, c’est aussi l’humaniste franco-arabe que le pouvoir total n’a pas transformé en brute totalitaire.

 

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